Le 1er novembre 2019, la Cour supérieure du Québec a accueilli le pourvoi en contrôle judiciaire de la demanderesse, avec frais de justice, et a ainsi annulé l’ordonnance d’euthanasie ayant été préalablement émise.
Les faits
Marylou Trahan est la propriétaire de Zuri, un chien ayant mortellement mordu le schnauzer miniature de son voisin, Michel Leroux. Le 6 août 2018, Marylou Trahan faisait patienter Zuri dans la cour arrière, tandis qu’elle était partie à l’intérieur de sa résidence pour prendre sa muselière en vue de sortir. C’est au même moment que Michel Leroux a ouvert la porte de la cour, où était Zuri. Il a ensuite attaqué gravement le schnauzer miniature.
À la suite de cet incident, des démarches de la part de la Ville de Montréal ont été entreprises. Le 22 août 2018, Marylou Trahan a reçu la visite d’employés de la ville, dont Beauregard Caillot et Lendsey Louis, qui lui ont notamment indiqué qu’elle recevra sous peu un constat d’infraction ainsi qu’une ordonnance d’euthanasier son chien.
La version des faits de Marylou Trahan mentionne que l’employé de la Ville « lui a dit qu’elle pourrait contester la décision de la Ville et que, le cas échéant, la procédure serait suspendue afin de permettre à la Ville de procéder à une évaluation comportementale de Zuri. Selon M. Louis, dont la version est corroborée par Mme Beauregard Caillot, il a plutôt expliqué à Mme Trahan que la décision de la Ville pouvait faire l’objet d’une contestation judiciaire et que si Mme Trahan choisissait d’emprunter cette voie, elle aurait l’occasion de soumettre Zuri à une évaluation comportementale par un expert de son choix. »
De telles ordonnances peuvent être émises par la ville en vertu du Règlement sur le contrôle des animaux no 16-060 de la Ville de Montréal. Dans cette affaire, Marylou Trahan conteste la validité de l’ordonnance. Son raisonnement est essentiellement basé sur le fait qu’elle estime que la Ville aurait agi à l’encontre de l’équité procédurale et que les dispositions du règlement permettant d’émettre cette ordonnance seraient nulles, invalides et inopposables.
La décision
En premier lieu, le tribunal a conclu que l’équité procédurale, notamment de tenir en compte de la preuve et des observations de Marylou Trahan, s’imposait à la Ville Montréal, puisqu’une ambiguïté est présente quant au libellé des dispositions du règlement et que « l’interprétation prônée par Mme Trahan doit prévaloir, car elle réalise un meilleur équilibre entre ces valeurs de sécurité publique et de bien-être animal. »
En deuxième lieu, la Cour supérieure a établi que l’équité procédurale n’a pas été respecté, puisque dans le but de s’y conformer, la Ville aurait dû informer Marylou Trahan des risques que la procédure entreprise puisse conduire à une ordonnance d’euthanasie. Également, le fait de ne pas avoir pris en compte le point de vue de la propriétaire du chien, relativement à son niveau de dangerosité, illustre le non-respect de l’équité procédurale par la Ville.
Pour ces raisons, l’invalidité de l’ordonnance du 22 août 2018 peut être prononcée.
De plus, la thèse de Marylou Trahan selon laquelle « les dispositions réglementaires sur lesquelles la Ville s’est appuyée seraient nulles, invalides et inopposables, car contraires tant à l’équité procédurale qu’à l’article 6 de la Charte des droits et libertés de la personne » ne peut être retenue.
Enfin, le tribunal accueille le pourvoi en contrôle judiciaire, annule l’ordonnance d’euthanasie et renvoie le dossier à l’autorité compétente au sens du Règlement sur le contrôle des animaux no 16-060, et ce, en précisant que le point de vue de Marylou Trahan devra être pris en compte pour octroyer une décision.