Communauté Droit animalier Québec — DAQ c. Procureur général du Québec (Ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation), (Cour supérieure) – résumé – 2025 QCCS 1570 (14 mai 2025)
Le 14 mai 2025, la Cour supérieure a rejeté la demande du DAQ et du médecin vétérinaire Jean-Jacques Kona-Boun (les demandeurs) visant à obtenir une ordonnance d’injonction provisoire afin d’ordonner au ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) d’exercer son pouvoir d’ordonnance pour empêcher la tenue de l’épreuve de prise du veau au lasso et de mieux encadrer l’épreuve du terrassement des bouvillons lors du Festival Western de St-Tite, prévu les 17 et 18 mai 2025.
Les faits
Depuis 2017, le MAPAQ et le DAQ ont évalué séparément les impacts de ces épreuves, notamment sur le bien-être et la santé des êtres animaux. En juillet 2022, un rapport du MAPAQ rédigé par quatre médecins vétérinaires mandatés par ce dernier concluait que la prise du veau au lasso était incompatible avec le bien-être animal et recommandait sa cessation, tout en formulant des recommandations minimales si l’activité devait se poursuivre : 19 pour la prise du veau au lasso, 12 pour le terrassement du bouvillon.
Le Festival a avancé qu’il a mis en œuvre plusieurs de ces recommandations. Le MAPAQ a également confié à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal et à Polytechnique Montréal un projet de recherche sur les effets à long terme de ces épreuves, dont les résultats sont attendus en 2026-2027.
Lors du Festival 2024, le Dr Kona-Boun a constaté des signes de détresse chez les êtres animaux, malgré la mise en œuvre de certaines recommandations. Le 25 mars 2025, les demandeurs ont soumis un signalement au MAPAQ, qui est resté sans réponse après un délai de 44 jours. Les demandeurs ont donc allégué un refus du MAPAQ d’utiliser les pouvoirs prévus à l’article 58 de la Loi BÊSA. Ils ont demandé à la Cour d’ordonner une intervention immédiate.
Le MAPAQ a soutenu qu’il fallait attendre les résultats scientifiques de l’étude en cours avant toute interdiction.
La décision
Le Tribunal a analysé les quatre critères d’une injonction provisoire :
- L’urgence ;
- L’apparence de droit ;
- Si l’ordonnance est nécessaire pour empêcher la survenance d’un préjudice sérieux ou irréparable ou pour empêcher la création d’un état de fait ou de droit de nature à rendre le jugement final inefficace ;
- Si la balance des inconvénients penche en faveur de la partie qui la demande.
Il a reconnu que le critère d’urgence était rempli, puisque la demande avait été déposée et présentée promptement.
Sur l’apparence de droit, le Tribunal a souligné que le Festival avait modifié ses pratiques, rendant impossible de conclure à une forte probabilité de violation de la Loi BÊSA. Il a noté que les vidéos de l’édition 2024 ne démontraient pas clairement de telles violations. Il a aussi précisé que le MAPAQ disposait d’un pouvoir discrétionnaire dans l’exercice de ses fonctions et que le Tribunal ne pouvait lui dicter sa conduite à ce stade.
Bien que ce deuxième critère n’ait pas été satisfait, le Tribunal a tout de même analysé brièvement les deux critères suivants. Il a reconnu l’existence d’un préjudice sérieux ou irréparable. Toutefois, il a jugé que la balance des inconvénients penchait en faveur du refus, notamment en raison des efforts correctifs du Festival.
Conclusion
Le Tribunal a donc rejeté la demande d’injonction provisoire formulée par les demandeurs.