Mateluna-Ahumada c. Ville de Charlemagne 2024 (Cour supérieure) – résumé – QCCS 54 (12 janvier 2024)

Mateluna-Ahumada c. Ville de Charlemagne 2024 QCCS 54

Résumé

Le 12 janvier 2024, la demanderesse, Mme Claudia Mateluna-Ahumada, a déposé un pourvoi en contrôle judiciaire afin de contester la résolution adoptée par la Ville de Charlemagne (« la Ville ») de procéder à l’euthanasie de son chien husky, Santos, à la suite d’une attaque de celui-ci.

Précédant cette décision, deux jugements ont été rendus par la Cour supérieure concernant l’émission d’une ordonnance de sauvegarde afin d’empêcher l’euthanasie de Santos et les objections de l’avocat de la demanderesse.

Dans le premier jugement, rendu le 15 septembre 2022, la Cour supérieure a suspendu l’euthanasie et accordé une ordonnance de sauvegarde au chien de la demanderesse, considérant que la décision de la Ville soulevait des enjeux sérieux et risquait d’entraîner un préjudice irréparable.

Dans le second jugement, rendu le du 2 mai 2023, la Cour supérieure a mis fin aux interrogatoires abusifs de la demanderesse, le tout avec dépens.

Les faits

Le 13 juillet 2022, à Charlemagne, Santos a gravement mordu un enfant de cinq ans qui circulait à trottinette dans la rue, lui causant une blessure nécessitant dix-huit points de suture. Le chien était connu pour plusieurs incidents antérieurs, notamment ayant attaqué et tué une poule appartenant à une voisine. Considéré à haut risque de récidive, Santos a été évalué le 19 juillet 2022 par Diane Aubert du Carrefour Canin qui l’a jugé agressif et dangereux, recommandant son euthanasie. Le 20 juillet 2022, lors d’une séance extraordinaire, le conseil municipal de Charlemagne a adopté une résolution en ce sens, conformément à l’article 10 du Règlement d’application de la Loi visant à favoriser la protection des personnes par la mise en place d’un encadrement concernant les chiens (« le Règlement »). Le 21 juillet 2022, la résolution a été communiquée à la demanderesse. Un litige s’est ensuivi au cours duquel le Tribunal a conclu que la demanderesse a démontré peu de bonne foi, multipliant les délais, relatant une version des faits manquant de crédibilité et refusant catégoriquement de se conformer à la décision de la Ville.

La décision

Les questions en litige sur lesquelles s’est penché le Tribunal sont les suivantes :

  1. Les objections à la preuve de la Ville sont-elles bien fondées?
  2. Quelle est la norme de contrôle applicable aux résolutions adoptées par la Ville visant à ordonner l’euthanasie de Santos?
  3. La Ville a-t-elle respecté son obligation d’équité procédurale envers Mme Mateluna-Ahumada ?
  4. La décision de la Ville s’avère-t-elle raisonnable en fonction des contraintes factuelles et juridiques en cause?

Le Tribunal a déterminé que les objections à la preuve de la Ville étaient, pour la plupart, mal fondées.

En ce qui a trait à la norme de contrôle applicable, le Tribunal a retenu la norme de la décision raisonnable, en raison du caractère municipal de la résolution, soulignant la nécessité de concilier la sécurité publique et le statut juridique de l’être animal.

En troisième lieu, le Tribunal s’est penché sur l’obligation de la Ville de faire preuve d’équité procédurale envers Mme Mateluna-Ahumada. La Ville a respecté les modalités prévues aux articles 12 à 14 du Règlement, en informant la propriétaire du chien de son intention et des motifs de la décision, en lui donnant l’occasion de présenter ses observations, puis en lui transmettant une décision écrite, motivée et conforme aux exigences de notification. Ls Ville a ainsi respecté l’équité procédurale. En revanche, le Tribunal a conclu que c’était la demanderesse qui avait causé des délais indus et manqué de diligence.

Aux paragraphes 112 à 144, le Tribunal a analysé la conciliation entre la sécurité publique et le bien-être et la sécurité des êtres animaux. Sur ce point, le Tribunal a indiqué que :

« […] Il n’existe aucune incompatibilité entre le Règlement d’application et l’article 898.1 C.c.Q., ni avec la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal.

[114] En dépit du principe voulant qu’un animal s’avère un être doué de sensibilité, ayant des impératifs biologiques (norme comportementale), il n’est pas interdit, en soi, d’abattre ou d’euthanasier un animal constituant une nuisance ou présentant un danger indu. »

De plus, le Tribunal a exposé que les municipalités détiennent le pouvoir discrétionnaire de déterminer si la blessure infligée par le chien mordeur s’avère grave ou non. Dans le contexte de l’article 11, rien n’oblige la municipalité à consulter un vétérinaire ou un expert en comportement animalier pour prendre la décision, lorsque les circonstances le justifient, d’ordonner l’euthanasie du chien potentiellement dangereux. De ce fait, un chien peut être déclaré potentiellement dangereux dès lors qu’il y a morsure ou blessure sur une personne ou un autre être animal.

En ce qui a trait à la dernière question en litige, le Tribunal a déterminé qu’à la lumière des faits, la Ville a :

« […] conformément au Règlement d’application, raisonnablement conclu que le chien Santos a mordu et attaqué une personne, en l’occurrence un enfant de cinq (5) ans (art. 9), que le chien lui a causé une blessure grave (art. 10) et que, même si la blessure n’était pas grave au sens de la Loi et du Règlement, les circonstances particulières à la présente instance justifient (art. 11) la décision de la Ville de déclarer le chien Santos potentiellement dangereux et d’en ordonner l’euthanasie. »

Conclusion

Le Tribunal a rejeté la demande de pourvoi en contrôle judiciaire de la demanderesse et ce avec frais de justice en faveur de la Ville et du Carrefour Canin.

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