NOS FIDÈLES COMPAGNONS ET LA LOI
Au Québec, les animaux sont aujourd’hui reconnus comme des « êtres doués de sensibilité » ayant des besoins essentiels. Votée en décembre 2015, la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal (Loi BÊSA) est venue élargir la protection offerte par le Code civil du Québec. Le droit a été réformé et les animaux sont depuis considérés comme des êtres sensibles, affranchis du statut de « biens meubles » que leur conférait l’ancienne législation. C’est ainsi que pour distinguer un état de l’autre, au terme « animal » ordinairement employé, nous préférons l’expression « être animal ».
LES QUATRE LAPINS
Les modifications juridiques de la loi font aussi appel, quand vient le temps d’agir, au principe de la prise en considération de la situation de nos fidèles compagnons. Toutefois, une telle considération morale ne profite pas à tous de la même façon. L’appartenance à une ou à l’autre des quatre catégories identifiées par la loi dictera le traitement et le degré de protection dont bénéficieront les êtres animaux, même ceux d’une même espèce. Prenons ainsi quatre lapins. Le premier, gardé comme compagnon à des fins d’agrément, sera classé dans la catégorie des êtres animaux domestiques. Le second, utilisé pour l’agriculture, sera reconnu comme un être animal d’élevage. Le troisième, un lapin à l’état sauvage, aura le titre d’être animal de la faune et, le quatrième, né hors le territoire québécois, celui d’espèce exotique. Il ressort, de façon un plus claire, que le régime juridique, et partant la protection, auquel aura droit un être animal différera selon son classement.
LES CINQ LIBERTÉS
Pour mieux comprendre les enjeux liés à la santé et à la protection de nos amis poilus, mentionnons que l’Organisation mondiale de la santé animale a créé des principes directeurs appelés les « Cinq libertés fondamentales », reconnues universellement. Ces Cinq libertés sont incluses dans la Loi BÊSA qui renferme plusieurs dispositions assurant leur respect. Elles sont :
- l’absence de faim, de soif et de malnutrition;
- l’absence de stress physique et thermique;
- l’absence de douleur, de lésions et de maladie;
- la possibilité pour l’être animal d’exprimer les comportements normaux de son espèce, et
- l’absence de peur et de détresse.
NOTRE RESPONSABILITÉ
Considérant ce qui précède, pouvons-nous être tenus responsable des dommages causés par notre compagnon à quatre pattes? La réponse est oui!
Il faut savoir que dans la plupart des poursuites, « une faute » doit obligatoirement être établie. Il en va autrement des causes impliquant un être animal. Par exemple, si, alors que vous êtes sur le trottoir à parler avec une de vos connaissances, votre chien mord un passant, ce dernier n’aura pas l’obligation devant le tribunal de prouver qu’il y a eu « faute » (telle votre distraction qui vous empêchait de surveiller votre chien). Le passant devra simplement démontrer que votre être animal l’a mordu. Le tribunal pourra, par la suite, vous ordonner de payer des dommages-intérêts au passant afin de le dédommager de ses blessures.
Vous ne pourrez vous dégager de votre responsabilité que si la faute relève du passant ou de celle d’une autre personne (par exemple, celle avec qui vous parliez), ou encore en cas de force majeure (par exemple, un coup de tonnerre qui aurait effrayé votre chien et l’aurait poussé à mordre). Notez qu’une personne qui a la garde d’un être animal pourrait aussi être tenue responsable, conjointement avec le propriétaire, de tout dommage.
LES DOMMAGES MORAUX
La Loi BÊSA énonce que « l’espèce humaine a une responsabilité individuelle et collective de veiller au bien-être et à la sécurité des [êtres] animaux ». Ces derniers étant dotés d’une intelligence et d’un système nerveux leur permettant de ressentir des émotions, du plaisir ou de la douleur, le propriétaire/tuteur ou la personne ayant leur garde doivent remplir certaines obligations afin de s’assurer que leur bien-être et leur sécurité ne soient pas compromis.
La souffrance, la peine, le choc émotionnel et le stress, conséquences émotives de la perte de son compagnon, peuvent désormais être compensés par les tribunaux s’il est prouvé que cette perte résulte de la faute d’autres personnes. Les tribunaux ont également commencé à augmenter le montant des dommages moraux exigés en compensation du préjudice subi par une personne à la suite de la perte de son être animal de compagnie.
Au DAQ, l’étude des décisions rendues depuis l’entrée en vigueur de la Loi BÊSA nous a permis de constater cette augmentation. Nous en concluons que, si la tendance se maintient, il est à prévoir que les tribunaux continuent de bonifier les sommes allouées, témoignant ainsi d’une reconnaissance accrue du lien unissant les êtres animal et humain.
VIOLATIONS DE LA LOI BÊSA
La Loi BÊSA impose aussi des obligations et y contrevenir constitue une infraction passible d’une amende, voire d’une peine d’emprisonnement. Dans le cas d’une présumée violation de la loi, une plainte devra être portée au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) qui pourrait produire un rapport dans lequel des recommandations seraient émises. Si, dans les délais prescrits, la situation n’est pas corrigée, l’inspecteur du MAPAQ responsable du dossier pourra déposer un rapport d’infraction auprès du ministère de la Justice ou procéder à une saisie des êtres animaux touchés par la situation. La Loi BÊSA prévoit même des sanctions pénales allant de 2 500 à 125 000 dollars, ainsi que des peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 18 mois. Rappelons que la Loi BÊSA comporte des exceptions importantes pour l’élevage industriel et la recherche scientifique, et qu’elle ne s’applique pas non plus aux êtres animaux de la faune ou exotiques, tels les perroquets.
AGISSEZ
En conclusion, comme les êtres animaux ne peuvent pas dénoncer les abus, la maltraitance ou les blessures dont ils sont victimes, il appartient aux Québécois et Québécoises de s’assurer du respect de leurs Cinq libertés largement reconnues. Si le bien-être et la sécurité des êtres animaux vous tiennent à cœur, agissez! Nous avons tous un rôle à jouer.
C’est pourquoi nous vous rappelons que, si vous êtes témoin d’une situation qui compromet la santé ou la sécurité d’un être animal, vous pouvez faire un SIGNALEMENT, GRATUIT ET ANONYME, AU 1 844 ANIMAUX. Vous protégerez ainsi les êtres animaux au Québec en faisant appliquer la loi par l’imposition d’amendes et même de peines de prison.